Transfert de l’eau et de l’assainissement : il faut tourner la page
L’article que j’avais consacré le mois dernier à la nouvelle jurisprudence sur le transfert de compétence aura été un des plus lus depuis que ma lettre existe, ce qui est le signe de l’intérêt que beaucoup portent à cette question.
Je n’y reviens que pour répondre à certaines des réactions que j’ai eues, et qui me font grief de ne pas aller jusqu’au bout, c’est-à-dire de ne pas utiliser la décision du tribunal administratif de Montpellier pour à mon tour tenter de faire annuler la modification des statuts de la Communauté. Pourquoi, me demande-t-on par exemple, ne pas aller jusqu’au bout maintenant que la justice vous a donné raison ? Pour deux raisons, dont l’une tient à l’esprit de responsabilité et l’autre à l’esprit de démocratie.
Si un tel recours était mis en œuvre aujourd’hui et s’il aboutissait, il en résulterait un chaos indescriptible qui risquerait de suspendre un service public de première nécessité. J’exerce des responsabilités publiques depuis 25 ans, et j’ai veillé pendant 20 ans, à la tête d’E2S, à la continuité de l’approvisionnement en eau, ce qui a pu parfois me conduire à prendre des décisions qui me faisaient prendre un risque personnel ou à arbitrer en pleine nuit entre deux solutions techniques. Je n’ai pas fait tout cela pour en venir aujourd’hui, simplement pour ma gloriole et mon égo, faire obstacle à une régie communautaire, qui sans doute n’est pas parfaite, mais qui dorénavant existe et fonctionne. En d’autres termes, il est trop tard : si le référé de décembre 2019 avait abouti, le service public n’aurait pas été en danger puisque les communes auraient continué à distribuer de l’eau. Mais un recours qui aboutirait vers le début 2022 (délais du TA) casserait un outil existant alors même que de toutes façons le transfert serait devenu fatal dès 2026.
L’autre raison tient au respect de la démocratie. Je constate qu’il existe aujourd’hui une majorité communautaire attachée à ce transfert et je la respecte en tant que telle. Bien sûr, il y a des intercommunalités qui prennent en compte la récente loi Engagement et Proximité pour proposer aux communes qui le souhaitent une subdélégation de cette compétence. Par exemple, tout près de chez nous, la CASA (communauté d’agglomération de Sophia Antipolis) vient d’autoriser la commune de Châteauneuf à conserver l’exercice de cette compétence par subdélégation. Je regrette que cet esprit n’inspire pas notre Intercommunalité dont je sais pertinemment qu’elle n’envisagera jamais de proposer au conseil communautaire une telle option. Mais en même temps, je sais aussi que si elle le faisait, c’est-à-dire que si elle soumettait au vote la possibilité de concéder une telle subdélégation, la majorité communautaire actuelle la refuserait. Même si je le regrette, il faut en prendre acte. La page est tournée, à chacun maintenant, avec sa sensibilité et sa vision des choses, de bonifier l’outil qui existe.